Olivier MÉVEL « Les consommateurs vous font confiance, profitez-en ! »
Olivier Mével termine un travail d’enquête et d’analyse pour la Région Pays de la Loire. Elle souhaitait un état des lieux de l’offre et de la demande alimentaires. Il en ressort que les consommateurs peinent à trouver les produits locaux qu’ils recherchent.
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Comment avez-vous travaillé pour aider la Région à définir sa stratégie dans les secteurs agricoles et alimentaires ?
Olivier Mével : La première étape visait à élaborer une méthode pour faire ressortir les enjeux majeurs des diverses productions. Nous avons d’abord confié la réalisation de l’état des lieux de la production à la chambre d’agriculture. Nous avons ensuite constitué un comité d’experts pour chaque filière en rassemblant des représentants de la production, de la transformation et de la distribution. Dans le secteur laitier, la préoccupation majeure qui ressortait à première vue était économique. Après discussions, l’enjeu de la qualité a pris le dessus, reléguant l’économie et la question de la valeur ajoutée au second plan. La Région m’a alors demandé de mieux cerner les attentes des consommateurs, ce qui nécessitait une enquête.
Que recherchent les consommateurs dans les rayons des produits laitiers ?
O.M. : Nous avons interrogé 500 personnes de la région et autant dans le reste de la France. Il s’avère que 93 % achètent les produits laitiers en grandes surfaces. C’est un poids écrasant que l’on ne retrouve dans aucun autre secteur alimentaire. Ils consomment des produits laitiers d’abord parce qu’ils les aiment, mais aussi parce qu’ils considèrent qu’ils sont sains et bons pour la santé, surtout pour les enfants. Le discours antilait ne perce pas vraiment. Le prix est un élément de choix important. Mais les consommateurs estiment qu’il serait légitime de payer le litre de lait autour de 1,10 €. C’est bien plus que ce qui est pratiqué. Il faut peut-être y voir un impact de la démarche C’est qui le patron ? Cela signifie que l’arbitrage pratiqué entre les industriels et les distributeurs ne convient pas plus aux consommateurs qu’aux producteurs qui subissent une sous-valorisation.
Comment évaluent-ils la qualité des produits laitiers qu’ils achètent ?
O.M. : Les signes officiels de qualité ne pèsent quasiment pas dans les critères de choix des produits. Ils sont connus, mais semblent vides de sens pour beaucoup. 75 % privilégient les produits français, mais le local est encore plus important à leurs yeux pour garantir la qualité. La ferme de proximité, avec une identité marquée et les valeurs véhiculées par le monde agricole, apporte une réassurance face à la mondialisation. Au-delà, les consommateurs sont soucieux de soutenir les producteurs de leur région par leurs achats. Sauf qu’ils ne trouvent pas ces produits dans les rayons. Les produits laitiers des Pays de la Loire n’ont pas d’identité.
Comment les éleveurs peuvent-ils tirer profit de cette situation ?
O.M. : Outre le fort élan de solidarité des consommateurs vis-à-vis des éleveurs de leur région, l’enquête montre la forte confiance dont ils sont l’objet. Les trois quarts des enquêtés se fient d’abord à ceux qui produisent pour garantir la qualité des produits laitiers. Les transformateurs, les distributeurs et les institutions territoriales se classent très loin derrière. On sent donc les consommateurs prêts à acheter des produits laitiers locaux clairement identifiés, pour peu que les éleveurs s’investissent et leur garantissent la qualité. Ils s’intéressent aux modes de production et seuls les éleveurs sont crédibles pour en parler. Pour s’informer, ils font davantage confiance aux réseaux sociaux qu’aux médias. Les éleveurs ont intérêt à répondre à ces attentes. Ils doivent faire connaître leur façon de travailler, ouvrir leurs fermes au grand public.
Et maintenant ? Comment agir ?
O.M. : La Région a utilisé ce travail pour élaborer sa stratégie. Elle mise sur la recherche et l’innovation pour créer de la valeur. Elle souhaite communiquer sur l’origine Pays de la Loire afin de créer une identité qui fait défaut. Pourquoi ne pas inventer des fromages propres à la région ? De nouveaux modes de commercialisation des produits vont être expérimentés. L’objectif est clairement de fournir aux consommateurs les produits locaux qu’ils recherchent, d’augmenter la création de valeur ajoutée et de la répercuter aux producteurs. Il s’agit aussi de développer l’économie locale et de dynamiser l’emploi.
Propos recueillis par Pascale Le CannPour accéder à l'ensembles nos offres :